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Les entrevues d’enquête – L’essentiel

Sous la direction de Michel St-Yves
Cowansville, QC, Les Éditions Yvon Blais. 2014.

Le directeur de cette collection d’articles originaux est bien connu à la fois du monde universitaire, en particulier de la criminologie et du droit pénal, « et » du monde des praticiens, en particulier au niveau des services policiers. En effet, Michel St-Yves est psychologue judiciaire à la Sûreté du Québec, l’équivalent de la Police nationale en France. Il travaille au Service de l’analyse du comportement, une unité spécialisée de soutien aux enquêtes criminelles, aussi bien pour établir le profil psychologique d’un suspect que pour les interrogatoires de police. Il enseigne aussi la psychologie des entrevues d’enquête à l’École nationale de police du Québec et il est chargé de cours à l’École de criminologie de l’Université de Montréal. Il a également participé à la mise en place de la première formation continue en matière d’entrevue d’enquête en Suisse. De plus, il est conférencier à l’École nationale de la magistrature de Bordeaux et correspondant scientifique pour le Département des sciences du comportement de la Gendarmerie nationale en France. Ses publications, en français et en anglais, portent principalement sur la psychologie des enquêtes criminelles, la négociation en situation de crise et l’interrogatoire de police. Il est l’auteur ou le co-auteur de plusieurs articles et livres scientifiques, dont: Psychologie des entrevues d’enquêtes / De la recherche à la pratique (2004); Psychologie de l’enquête criminelle / La recherche de la vérité (2007); et « Psychologie de l’intervention policière en situation de crise (2011). Comme le souligne le préfacier du livre de 2014, Ray Bull, professeur en enquêtes criminelles en Angleterre, le bon déroulement des entrevues de témoins, de victimes et de suspects est d’une grande importance pour toutes les nations et toutes les cultures. Toutefois, jusqu’à tout récemment, ceux à qui l’on demandait d’effectuer ces entrevues ne recevaient pas de formation adéquate ou de conseils appropriées pour y parvenir efficacement. Une des raisons qui explique cette lacune mondiale en matière de formation est le fait que très peu de chercheurs se sont donnés la peine d’étudier ce sujet vital, probablement parce que de telles recherches sont difficiles à effectuer, tant en ce qui concerne l’accès à de telles entrevues que la façon de concevoir, exécuter et analyser les résultats de ces recherches. Et Ray Bull d’ajouter que, heureusement, au cours des 10 ou 15 dernières années, certains pionniers ont été assez braves pour quitter leurs laboratoires douillets (dans lesquels il est plus facile d’effectuer de la recherche) et pour étudier les enquêtes telles qu’elles se déroulent sur le terrain (où il est nécessaire de faire preuve de beaucoup plus d’ingéniosité qu’en laboratoire). Parmi ces pionniers, Ray Bull souligne, évidemment, que Michel St-Yves « est une des rares personnes qui non seulement effectue de la recherche sur le terrain, mais travaille également sur une base quotidienne au sein d’un service de police » (p. X). L’on pourrait d’ailleurs en dire autant de plusieurs des collaborateurs choisis par Michel St-Yves pour cette collection originale de 2014. Mentionnons donc les principaux titres des chapitres afin d’éclairer le lecteur:

  • La relation dans l’entrevue d’enquête / Cinq règles fondamentales.
  • L’entrevue de témoins et de victimes.
  • L’entrevue d’enfants.
  • Les erreurs d’identification des témoins oculaires.
  • Les faux souvenirs.
  • L’entrevue de suspects.
  • Les vulnérabilités mentales et les fausses confessions.
  • La détection du mensonge / Mythes et possibilités.
  • L’enseignement des entrevues d’enquête / Constats et défis.

Les entrevues d’enquête représentent une part considérable du travail d’enquêteurs. Lorsqu’elles sont bien menées, ces entrevues permettent de résoudre de nombreuses affaires criminelles: une victime qui donne une bonne description de son agresseur; un témoin qui a relevé un numéro de plaque d’immatriculation; un suspect qui, par sentiment de culpabilité ou après avoir pris connaissance de la preuve, passe aux aveux.

Comme le souligne Michel St-Yves lui même, en conclusion, autrefois, la façon de faire des entrevues d’enquête se limitait à questionner les gens et à prendre en note leurs réponses. Cette méthode « classique », du type « questions-réponses », était plutôt improvisée, voire intuitive. Aujourd’hui, en bonne partie grâce à la science, nous savons que pour obtenir de meilleurs résultats, il faut aussi entrer dans la dimension relationnelle de l’affaire, c’est-à-dire prendre le temps de créer un rapport avec le témoin, de s’intéresser à lui et à ce qu’il raconte. Pour y parvenir, il y a des règles et des méthodes à respecter, dont celle de rester le plus objectif possible. Et de conclure avec conviction:  » Même si l’entrevue parfaite n’existe pas, il faut continuer de viser les plus hauts standards de qualité pour se rapprocher encore un peu plus de cette vérité tant convoitée, celle qui permet bien souvent de résoudre des affaires criminelles et qui contribue à une meilleure justice. N’est-ce pas cela l’essentiel des entrevues d’enquête » (p. 301).

Michel St-Yves rend donc un très grand service aux spécialistes des enquêtes, qu’ils soient des enquêteurs-policiers ou des enquêteurs-civils. Son livre peut également être fort utile à ceux qui utilisent professionnellement les rapports d’enquête, que ce soit les avocats-criminalistes, les procureurs en matière criminelle, les juges en matière criminelle, ainsi que les psychologues et les criminologues qui s’intéressent à ce champ d’action … Michel St-Yves mérite donc « hautement » des éloges pour ce livre fort utile. Il se mérite aussi, à mon avis, le double titre d’universitaire « et » de praticien « émérites », ce qui est fort rare en criminologie et en droit pénal.

ANDRÉ NORMANDEAU
Université de Montréal

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