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Remèdes mortels et crime organisé. Comment l’industrie pharmaceutique a corrompu les services de santé

Par Peter Gotzsche [F. Turcotte, Trad.]
Québec : Presses de l’Université Laval (PUL). 2019. 628 p.

Ce livre en format de poche est la version francophone d’un livre publié à l’origine en anglais sous le titre: Deadly Medicines and Organized Crime / How Big Pharma has Corrupted Healthcare (New York : Radcliffe, 2013). La traduction est celle du Dr. Fernand Turcotte, un médecin du Québec. Une traduction « hors-pair » d’un livre de plus de 600 pages. Ce livre est un livre « criminologique » assez rare car il fait le procès « bien documenté » de l’industrie pharmaceutique, en particulier de « certains médecins » et de « certains chercheurs » en médecine et en pharmacie. Peter Gotzsche est un Danois qui a obtenu une maîtrise en biologie et en chimie et son diplôme en médecine.

Les médicaments d’ordonnance sont la troisième cause de mortalité après les maladies cardiaques et les cancers. Dans cet ouvrage relativement révolutionnaire et novateur, Peter Gotzsche lève le voile sur les comportements frauduleux de l’industrie pharmaceutique dans les domaines de la recherche et de la commercialisation et sur son mépris moralement « répugnant », nous dit l’auteur, pour la vie humaine. Peter Gotzsche, d’ailleurs, ne se gêne pas pour utiliser des « gros mots » envers cette industrie, des mots surprenants en général en criminologie pour un livre scientifique, mais pleinement justifié à notre avis dans le contexte de ce livre « coup-de-poing ». L’auteur établit des rapprochements convaincants entre l’industrie pharmaceutique et l’industrie du tabac et révèle l’extraordinaire vérité derrière les efforts déployés pour semer la confusion et détourner l’attention du public et des politiciens.

Le livre est écrit « avec fougue et passion », ce qui n’en fait pas moins un livre professionnel de qualité. Son style direct et engagé rend le message et la dénonciation de ce système encore plus crédible. Les titres de certains chapitres en sont l’écho, à savoir à titre d’exemple:

  • Le crime organisé, modèle d’affaires des grosses compagnies pharmaceutiques (chapitre 3).
  • Très peu de patients tirent avantage des médicaments qu’ils consomment (chapitre 4).
  • Les conflits d’intérêts dans les périodiques médicaux (chapitre 6).
  • L’influence corruptrice de l’argent facile (chapitre 7).
  • Vendre sous pression ( chapitre 9).
  • L’accès public aux données des agences du médicament (chapitre 11).
  • Merck, où les patients meurent en premier (chapitre 13).
  • La psychiatrie, paradis de l’industrie pharmaceutique (chapitre 17).
  • Inciter les enfants au suicide avec de pilules du bonheur (chapitre 18).
  • Intimidation, menaces et violence pour protéger les ventes (chapitre 19).
  • La faillite générale du système commande une révolution (chapitre 21).

L’avant-propos du livre par le Dr. Richard Smith mentionne que le nom de Peter Gotzsche comme orateur dans un congrès ou comme collaborateur cité dans la table des matières d’un périodique suffit à soulever l’enthousiasme d’innombrables personnes. En effet, dit-il, on peut le comparer au jeune garçon qui voyait bien que l’empereur était nu et qui ne se gênait pas pour le dire. Or, la plupart d’entre nous ne voyons pas la nudité de l’empereur et, dans le cas contraire, n’oserions pas en parler. « Voilà pourquoi nous avons un si grand besoin de gens comme Peter. Avec lui, pas de compromis ni de dissimulation, mais un franc parler assorti de métaphores colorées. L’insistance de Peter à comparer l’industrie pharmaceutique au crime organisé peut certes en déranger plusieurs, mais renoncer à lire le présent ouvrage pour ce motif, ce serait rater l’occasion de comprendre une réalité importante et de s’en indigner » (p. VII).

Un livre de plus de 600 pages ne se résume pas à proprement parler. Je peux néanmoins le recommander « fortement » au lecteur car il se lit comme un roman, tout en étant en fait un document dont le message est scientifique. Un rare livre criminologique écrit à la fois de façon populaire tout en étant bien assis sur la recherche de la vérité. Un jour, nous aurons besoin d’un autre Peter Gotzsche pour  faire le procès scientifique de la pandémie du coronavirus, dit le Covic-19, en pensant aux lacunes « peut-être de nature criminelle » du monde médical et du monde politique qui n’ont pas prévu de façon satisfaisante la crise sanitaire que nous avons vécu en 2020 et qui n’ont pas préparé la réponse médicale à cette crise de façon appropriée, me semble-t-il.

ANDRÉ NORMANDEAU
UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

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